La longue marche de l’Afrique vers la démocratie

Publié le par Jérôme Car

Démocratie : l’Afrique n’est ni réfractaire ni allergique à la démocratie. L’ ancien président français pensait alors avoir des lettres pour poser un diagnostic sur notre continent, indiquer ce qui doit lui convenir et dessiner, en connaisseur averti, la courbe de son avenir socio politique. Comment soutenir que la démocratie pluraliste n’est pas faite pour l’Afrique, vision Jacques Chirac et trouver normal et naturel, version Banque mondiale et Fonds monétaire international, que c’est le capitalisme, dans sa forme pure et dure, qui sied le mieux au développement du continent ?


En fait, la vérité de chacun est à situer du côté de ses intérêts bien compris. Mais quelle est la vérité de l’Afrique ? On ne peut pas soutenir, sous l’éclairage des faits, que l’Afrique n’avance pas, que l’Afrique marque le pas sur le chemin de la démocratie. Si l’on devait seulement reconnaître qu’elle avance comme un escargot, c'est-à-dire très lentement, cela aurait suffi à nous rendre justice.

C’est notre conviction : l’Afrique avance sur le chemin de la démocratie. Mais elle le fait à son rythme, avec des hauts et des bas, en fonction des contingences de son environnement humain et matériel. Au tournant des années 60, dans l’euphorie des indépendances, la non ingérence était alors le principe qui régissait les relations entre nos différents pays. Dans ce contexte, libre à Ahmed Sékou Touré, en Guinée Conakry ou à Macias Nguéma, en Guinée Equatoriale, de pendre haut et court leurs opposants. Il ne serait venu à l’esprit de personne de lever le petit doigt, de protester, donc de s’ingérer dans les affaires intérieures de pays souverains et indépendants. Il y avait un accord tacite et universel au nom duquel personne ne devait s’autoriser à regarder par-dessus ses frontières nationales et à se préoccuper de ce qui se passait chez le voisin. Chacun chez soi pour que Dieu fût partout.

Mais la non ingérence a fait place depuis à la non indifférence qui consacre un droit d’ingérence en bonne et due forme. Pourquoi les militaires qui ont assassiné Lino Vieyra, le Chef de l’Etat de Guinée Bissau, ne sont-ils pas allés plus loin en s’accaparant par exemple du pouvoir qui était pourtant à leur portée ? Pourquoi les militaires malgaches qui ont été les éléments déterminants dans le contrôle du pouvoir par l’ancien maire de la capitale ont-ils choisi de maquiller leur coup d’Etat en une simple dévolution de pouvoir ?

Vraiment, les temps changent. Commence à prendre fin l’ère des coups d’Etat qui plaçaient automatiquement et invariablement l’Armée aux commandes de l’Etat. En Mauritanie ou en Guinée Conakry, pays où les militaires ont osé franchir le Rubicon, la communauté internationale s’est coalisée pour leur signifier, en des termes fermes, les limites à ne pas dépasser, les délais à respecter pour renouer, par les urnes, avec la légalité et la légitimité républicaine.

C’est nouveau et cela induit l’idée d’un progrès certain. De telles dispositions, deux ou trois décennies plus tôt, nous auraient évité les frasques burlesques d’un Bokassa en Centrafrique, les délires autocratiques d’un Amin Dada en Ouganda ou la folie meurtrière d’un Macias Nguéma en Guinée Equatoriale. C’est clair : même si l’on ne croit pas encore tout à fait aux urnes, on y a cependant recours ; même quand on se sent pris par une irrépressible démangeaison du coup d’Etat, on s’y prend désormais à deux fois avant de passer à l’acte. Aussi y a-t-il de moins en moins de téméraires pour s’afficher putschistes et braver l’infamie d’être tenus pour violateurs des lois, ennemis des libertés.

Les progrès de la science, de la technique et de la technologie s’en mêlent désormais. Ils laissent de moins en moins de marge aux tricheurs et aux tripatouilleurs. Ces progrès, en effet, ne cessent d’améliorer les diverses prestations et opérations en matière électorale. C’est ce qui explique que dans le cas du Bénin, par exemple, tous ceux qui tardent à donner une suite favorable à la mise en place de la liste électorale permanente informatisée (Lépi) sont suspects, en quelque manière, aux yeux de l’opinion qui les tient pour de potentiels fraudeurs.

Au regard de quoi, les dérives « pouvoiristes » d’un Mugabe au Zimbabwe, les interférences confusionnistes entre les affaires de l’Etat et les affaires de la famille Eyadéma au Togo, les velléités monarchistes de certains Chef d’Etat qui rêvent de céder leur trône et de dérouler le tapis rouge à leurs enfants, sont à tenir pour les derniers soubresauts d’une certaine Afrique qui se meurt. Il faut avoir la force nécessaire de visualisation pour voir poindre l’aube nouvelle d’une nouvelle Afrique. Car demain, c’est déjà aujourd’hui !

La chronique du jour du 21 avril 2009 los
AUTEUR:http://blesshnet.com/heberg/laraignee/ - Jérôme Car
2009-04-21 09:38:20

Publié dans AFRIQUE

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